Avec le réchauffement de la planète dû aux changements climatiques, les phénomènes météorologiques évoluent et, dans bien des cas, gagnent en violence. Les vagues de chaleur se font plus torrides, les épisodes de sécheresse s’accentuent et se prolongent, les pluies de mousson s’amplifient et les tempêtes gagnent en fréquence comme en violence, tandis que la montée des mers aggravera l’impact des marées de tempête sur les communautés côtières. Cependant, des solutions existent. Des objectifs ambitieux de réduction des émissions des gaz à effet de serre pourraient empêcher la poursuite du réchauffement, tandis que des investissements destinés à renforcer la résilience locale et à réduire les risques des catastrophes peuvent contribuer à limiter les dégâts et les coûts humains.

L’adoption du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe, en mars, ainsi que les initiatives comme la «Coalition d’un milliard» lancée par la FICR pour renforcer la résilience communautaire, contribuent à faire de la préparation aux catastrophes causées par les changements climatiques une composante clé tant des Objectifs de développement durable adoptés par les Nations Unies que de la conférence des parties à la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques («COP 21»), au mois de décembre à Paris. Ces activités globales doivent toutefois être associées aux politiques nationales et à des solutions concrètes répondant aux besoins locaux. Le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge est à l’œuvre depuis longtemps, à l’échelle mondiale comme sur le plan local, en combinant les techniques et les méthodes modernes avec des pratiques traditionnelles plus anciennes afin de réduire les risques dans les communautés les plus touchées par les changements climatiques.

Photo : REUTERS/NOAA

Des plantes protectrices

À l’instar de bien d’autres pays d’Asie du Sud-Est, le Viet Nam est sujet aux marées de tempête, aux inondations et aux sécheresses qui menacent toujours plus les rives verdoyantes du pays et ses immenses deltas. Avec ses quelque 3260 kilomètres de côtes et les six à huit typhons qu’il subit chaque année, le pays est classé parmi les nations les plus touchées en termes de victimes humaines et de pertes économiques.

Si le niveau des mers s’élevait de 65 à 100 centimètres d’ici à 2100, comme le prédit le Groupe intergouvernemental d’experts sur les changements climatiques, les conséquences sur la population vivant dans les zones côtières — quelque 6 millions de personnes — pourraient être très graves.

Parallèlement, la croissance démographique et économique rapide, accompagnée par l’expansion et l’intensification de l’agriculture, la conversion des zones humides et l’urbanisation, ont exacerbé la vulnérabilité des régions côtières.

Ainsi, la multiplication des élevages de crevettes et d’autres projets de développement industriel et urbain ont fortement réduit la surface des mangroves, qui offrent des nutriments à la faune aquatique dont dépendent de nombreux habitants pour leur alimentation comme pour leur revenu. Les mangroves protègent aussi les communautés contre les marées de tempête et contre l’érosion en retenant le sol dans les périodes de fortes précipitations, ce qui stabilise les lignes côtières.

C’est pourquoi la reconstitution des mangroves est une priorité pour les acteurs publics et non gouvernementaux de la région, dont la Croix-Rouge du Viet Nam, qui joue un rôle de premier plan dans cette action.

Un récent rapport d’évaluation a conclu que ces efforts avaient eu des effets importants pour réduire les risques de catastrophe et pour améliorer les moyens d’existence de la population locale. La reconstitution des mangroves aurait, selon le rapport, permis de protéger indirectement près de 2 millions de personnes. En comparant les dégâts causés par des typhons similaires avant et après l’intervention, l’évaluation a conclu que les dommages aux digues ont été réduits d’un montant allant de 80 000 à 295 000 dollars des É.-U. Cette somme est inférieure au coût des plantations d’arbres, mais les économies totales réalisées globalement en réduisant les risques pour les communautés atteignent environ 15 millions de dollars.

Dans le même temps, le rendement par hectare des produits de l’aquaculture comme les crustacés a bondi de 209 à 789 % selon les espèces. Les bénéfices économiques directs des activités telles que celles-ci atteindraient entre 344 000 et 6,7 millions de dollars dans les communautés choisies pour l’évaluation.

Des espèces, des semences et de la formation

La Namibie, qui est déjà le pays au climat le plus sec en Afrique sub-saharienne,  connaît des épisodes de sécheresse de plus en plus accablants. Dans le nord du pays, où les communautés tribales dépendent des récoltes ou du bétail, la Croix-Rouge de Namibie aide la population à se préparer en fournissant une formation ainsi que des dons en espèces pour permettre aux habitants de se relever après la sécheresse.

Dans un pays où près de 70 % de la population travaille dans l’agriculture, la sécheresse touche des centaines de milliers de personnes. Les récoltes sont réduites, les pâtures se raréfient et les puits s’assèchent, ce qui oblige les paysans à parcourir des distances plus longues pour trouver des terres où leurs animaux peuvent s’alimenter. Les familles sont aussi contraintes de boire de l’eau insalubre.

En coopération avec la Croix-Rouge de Namibie, la FICR est intervenue dans quatre des régions les plus gravement touchées dans le nord du pays. Il s’agissait dans l’immédiat de faire parvenir aux personnes touchées de la nourriture, de l’eau potable et du matériel d’assainissement : citernes à eau, jerrycans et tablettes de purification d’eau. Des points d’eau, des puits notamment, ont aussi été remis en état.

Cependant, comme ce pays d’Afrique australe est régulièrement frappé par des catastrophes naturelles, répondre aux crises ne suffit pas. Les activités de la Croix-Rouge en Namibie sont donc axées en grande partie sur le soutien aux communautés pour leur permettre de prendre en main leur propre avenir. «L’impact des changements climatiques est très réel et les communautés doivent constamment s’adapter à l’évolution de l’environnement», affirme Kenny Hamilton, un délégué de la Croix-Rouge britannique qui collabore avec la FICR.

Une formation est dispensée aux communautés pastorales afin de les aider à gérer leur bétail de manière plus durable, tandis que des semences et des outils sont distribués aux agriculteurs, qui reçoivent aussi des informations sur des pratiques agricoles plus

durables.

Les ménages dans les communautés tribales reçoivent aussi des dons pour leur permettre d’acheter des animaux reproducteurs ou des semences, selon les tribus. Les dons en espèces permettent aux habitants de ne pas être contraints de vendre ou d’abattre leur bétail pour se nourrir : ils peuvent utiliser l’argent comme ils le souhaitent, ce qui contribue à soutenir les entreprises et l’économie locales.

L’intérêt du purok

Dans le cadre de l’opération de relèvement après le passage du typhon Haiyan, la Croix-Rouge philippine encourage activement la réduction des risques liés aux catastrophes dans certaines des communautés isolées des îles Calamian, dans le nord de Palawan, la province la plus occidentale.

Parmi elles, les Tagbanwa, nombreux à vivre dans des villages isolés, à deux heures de bateau, voire davantage, de Busuanga, l’île principale.

Ces îlots rocheux doivent importer leur eau du continent. Pour les aider à mieux gérer cette ressource et se préparer aux fréquentes tempêtes tropicales, la Croix-Rouge philippine finance des «visites d’apprentissage » des responsables de la communauté des îles Calamian à San Francisco, municipalité des îles Camotes réputée pour ses pratiques avancées de préparation aux catastrophes.

San Francisco est un paradis touristique, mais elle a surtout fait parler d’elle dernièrement car elle figure parmi les très rares sites de la région à n’avoir déploré aucun décès après le passage de Haiyan en novembre 2013. Les îles Camotes sont aussi connues pour leur bonne gestion de l’eau.

«La visite des Camotes donne aux dirigeants et aux aînés des idées nouvelles pour mieux gérer l’eau», explique Febbie Ann Motin, volontaire de la Société nationale et membre de la communauté de Cabugao, dans les Calamian, où la Croix-Rouge propose aussi des séances sur la manière de préserver la pureté de l’eau pour l’usage quotidien. «Il n’y a pas assez d’eau actuellement pour la lessive et la toilette.»

Ces connaissances pourraient être cruciales cette année, car, selon les météorologistes, le phénomène El Niño risque de réduire encore les précipitations à Palawan.

Catalina Jaime, déléguée réduction des risques de catastrophe de la Croix-Rouge suisse, qui soutient ce programme, assure que San Francisco est devenu un modèle en matière de préparation aux catastrophes, entre autres par son utilisation d’un système traditionnel de gestion des affaires locales et d’encouragement de l’autosuffisance. Dans ce système, les membres du groupe communautaire — ou purok — sont en première ligne pour informer et prévenir les habitants. Ceux-ci sont préparés aux tempêtes à venir et encouragés à participer à des programmes de réduction des risques et de lutte contre les maladies.

Selon les participants, les visites ont été très utiles : ils ont pu observer les relations entre les municipalités et leurs barangays (districts) respectifs et la manière dont les communautés s’organisent, à l’échelon des ménages, pour faire face aux catastrophes. «Dans le barangay d’Abaroan, par exemple, les inondations sont le risque numéro un; chaque famille est donc mobilisée pour réduire les risques et les conséquences des inondations», explique Lucy Joy Nery, volontaire de la Croix-Rouge philippine et dirigeante communautaire jeunesse à Maglalambay, dans les Calamian. «La communauté a aussi conçu un système d’alerte avancée grâce auquel le responsable du barangay connaît les capacités des membres de la communauté de se préparer aux événements.»

Les dirigeants des Calamian recevront, après ces visites, un soutien de la Croix-Rouge pour répliquer les mesures mises en place à San Francisco.

Une région à sec

Le Moyen-Orient est probablement le lieu de notre planète où le lien entre les conflits et l’eau est le plus apparent. Avant même les conflits des décennies récentes, les ressources en eau étaient déjà surexploitées dans de nombreux pays de la région.

Comme l’explique Guillaume Pierrehumbert, coordonnateur eau et habitat au CICR, qui a travaillé dans plusieurs pays de la région, «cette région dépend fortement de l’agriculture et de la production vivrière, qui exige beaucoup d’eau».

Le cas de la Jordanie est parlant : avant le conflit en Syrie et en Irak, et l’afflux de réfugiés, l’utilisation de l’eau dans le pays dépassait déjà le seuil de la durabilité. Dans de nombreuses parties du pays, les collectivités locales étaient confrontées à la baisse des nappes phréatiques, à la hausse des coûts de pompage et à la salinisation des nappes souterraines.

Parallèlement, les infrastructures vieillissantes ne parvenaient plus à répondre à la demande, selon un rapport récent du CICR sur l’approvisionnement en eau au Moyen-Orient intitulé Bled Dry: How war in the Middle East is bringing the region’s water supplies to breaking point. Le nord de la Jordanie présentait le taux le plus élevé de pertes en eau, ainsi que des problèmes de qualité de l’eau et de régularité de l’approvisionnement.

Or, la Jordanie a accueilli un nombre sans précédent de réfugiés fuyant la Syrie, venus s’ajouter aux vagues de réfugiés causées par les conflits en Irak et dans le Territoire palestinien occupé. Quelque 80 % des réfugiés syriens résident dans des communautés d’accueil, tandis que 20 % séjournent dans des camps.

Un endroit à l’ombre

Dans le nord du Paraguay, le soleil est si brûlant qu’il dessèche la terre, empêchant toute culture maraîchère et fruitière. Sur cette image, un habitant du village de Tacuatí Poty étend un écran qui va faire de l’ombre aux plantes fournies dans le cadre d’un programme du CICR réalisé avec la Croix-Rouge paraguayenne afin d’aider les familles rurales à faire face à la dureté du climat. «Sans ombre, le soleil brûle les plantes», explique Nélida González, une habitante. Le programme, destiné à aider les personnes touchées par la violence, fournit des outils, des semences et une formation, ainsi que le grillage, le tissu et les filets nécessaires pour atténuer le rayonnement solaire.

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